Lampron
Լամբրոն
Turquie | Royaume d'Arménie en Cilicie
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Toponymes connus
- Lampron - Lambron / Լամբրոն Armenian Med.
- Namrun Kalesi Turc Contemp.
- Çamliyayla - Çamlıyayla Turc Contemp.
Description
Histoire
Parmi l’impressionnant corpus de citadelles médiévales qui hérissent les sommets et crêtes du Taurus et de l’Amanus, Lampron apparaît comme celle dont l’histoire fut le plus intimement liée à celle, complexe et houleuse, des dynasties arméniennes qui luttèrent durant trois siècles pour exercer leur contrôle sur l’ eldorado cilicien.
Arrivée dans la région au cours de la seconde moitié du XIème siècle – vraisemblablement entre les années 1072 et 1085 – la future dynastie des Hétoumides hérita de la position forte de Lampron, scellant par la même occasion une alliance avec l’Empire byzantin, qui devait durer plus d’un siècle. Cette position stratégique, auparavant aménagée par les Grecs à la manière d’une grande citadelle-refuge, allait devenir, sous l’impulsion de ces forces nouvelles boutées par les Turcs Seljûkides hors de leurs contrées originelles, le refuge inexpugnable de leur lignée, une citadelle imprenable capable de défier les âges.
Les Roupéniens, champions de l’indépendance arméno-cilicienne – et arrivés au même moment que les Hétoumides -, refusèrent quant à eux la tutelle byzantine. Ils s’installèrent au coeur de l’Anti-Taurus, à Vahga, pour planifier et entreprendre la création d’un royaume arménien en Cilicie. Leurs confrontations avec les Hétoumides furent nombreuses tant leurs visions géopolitiques différaient. Les Roupéniens, conscients de la nécessaire unité des familles arméniennes dans leur lutte contre l’Empire et les Latins, tentèrent à plusieurs reprises de s’emparer de Lampron pour éliminer leur rivaux, lesquels s’opposaient systématiquement à leur marche vers l’indépendance. Pourtant, malgré la vigueur des assauts et le redoublement des efforts, les sièges menés par Mleh en 1171 et par Roupen III en 1182 furent des échecs. Lampron résista, faisant par la même durer cette division qui contrevenait aux aspirations des seigneurs de Vahga.
Au début du XIIIe sièce, c’est finalement par la ruse que la citadelle entra dans le giron des possessions roupéniennes. Léon Ier, ex-Léon II rebaptisé après son couronnement en 1198, premier roi arménien de Cilicie, arrangea le mariage de l’une de ses nièces avec l’un des fils du seigneur de Lampron. Ce mariage eut lieu à Tarse, et la plus grande partie des chevaliers hétoumides s’y rendit. Léon profita de ce dégarnissement momentané des défenses de la citadelle pour l’enlever avec ses propres forces qui avaient été assemblées en nombre pour l’occasion. La citadelle fut donc prise et le roi en donna la garde à sa propre mère, elle même princesse hétoumide, à titre de résidence d’été, la fraîcheur y étant garantie, même durant les plus intenses chaleurs.
Malgré sa conquête, Lampron fut quelques années plus tard à nouveau au coeur de révoltes menées contre le pouvoir central roupénien. En 1245, le baron Constantin de Lampron alla jusqu’à s’allier au sultan de Konya pour affronter Hétoum Ier. Battu, il fut exécuté pour haute trahison. Bien plus tard, les rois Lusignan de Chypre utilisèrent la citadelle comme prison, avant que les Mameluks ne s’en emparent et qu’elle ne sombre, dès lors, dans l’oubli.
Description
Le site de Lampron, choisi par les Byzantins à l’écart des grandes voies de communication apparaît comme une immense table à la forme d’amande, dont les bords sont autant de falaises rendant la position naturellement forte. De nombreuses traces d’occupations fossiles ornent les parois et il est à penser que ce site spectaculaire était déjà occupé de longue date. Les structures qui s’étendent sur près de 300 mètres sont composées d’une ville basse, elle même commandée par une citadelle placée sur le front d’attaque, au nord, face au plateau dont se détache l’ensemble.
Comme à Ranculat un parcours passant sous les courtines permet de rejoindre l’entrée principale de l’enceinte urbaine. Deux porteries sont encore conservées et portent la marque des architectes arméniens. Hormis quelques pans de courtines, aucun élément significatif n’est à relever dans la ville basse. La végétation envahissante masque les traces de bâti, et les racines des végétaux les plus anciens finissent, ci et la, d’arracher les derniers assemblages.
La citadelle bénéficia heureusement des soins nécessaires pour résister au temps. Son donjon défend toujours la pointe nord, où les architectes avaient accentué les défenses en la séparant du plateau par un vaste fossé taillé dans la roche, sur vingt mètres de large. Les salles voûtées et niches d’archères sont de belle facture mais il reste hasardeux d’en attribuer la réalisation à tel ou tel occupant ayant régné sur Lampron.