Césaire
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Toponymes connus
- Césaire
- Césarée
- Caesarea Latin
- Kaiserijah - قيسارية Arabic
- Kaysaria - קֵיסָרְיָה Hebrew Contemp.
Description
Histoire
La ville de Césarée, située entre Acre et Arsur sur le littoral de l’antique Philistie, fut édifiée par Hérode le Grand en l’an 20 de notre ère, sur le site d’un ancien comptoir phénicien que les Séleucides appelaient la « Tour de Straton » ( Stratonis Turris ) du nom du légendaire roi sidonien. Hérode fit si belle besogne qu’il nomma sa ville « Césarée », en l’honneur de l’empereur Auguste alors « César » de Rome …
Il est vrai que Césarée, avec son admirable port, son temple, son hippodrome, son amphithéâtre, son théâtre et ses aqueducs avait tout d’une ville impériale, faisant d’elle – si l’on en croit les Historiens de l’époque – l’un des plus grands ports de Méditerranée. Six siècles durant, la ville resta la capitale de la province romaine de Judée ( Provincia Judaea ) ainsi que la résidence officielle de ses gouverneurs, en ce compris Ponce Pilate…
Très tôt, le christianisme naissant s’y propagea : ce fut ainsi à Césarée que l’apôtre Pierre convertit et baptisa le premier païen, le centurion romain Cornelius (Actes 10 : 1-5, 25-28) ; ce fut également en ses murs que fut emprisonné Paul de Tarse, après son arrestation dans le Temple de Jérusalem (Actes 23 : 23-24).
À la fin du II e siècle, la ville devint le siège d’un évêché ainsi que d’une bibliothèque renommée – à qui l’on doit, parait-il, les premiers parchemins, nouveau support plus résistant que le papyrus- , fondée par Origène, l’un des « pères de l’Eglise ».
La ville fut considérablement fortifiée sous les Byzantins, lesquels, craignant les invasions perses puis arabes, édifièrent une nouvelle muraille et transformèrent l’amphithéâtre (comme à Bosseret et Zibel) en forteresse. Césarée connut par la suite un certain déclin sous la domination arabe et nombre de ses faubourgs furent transformés en vergers…
C’est donc une cité de second ordre, reléguée au statut de quasi bourgade, qui s’offrit, le 26 mai 1099, aux yeux des premiers Croisés au cours de leur descente de Beyrouth à Jérusalem. Bien qu’aux mains des Fatimides, l’aimable population de la ville ravitailla les troupes franques, qui célébrèrent la Pentecôte devant ses murs (29 mai 1099).
Suite à la prise de Jérusalem et la bataille d’Ascalon, qui ruina momentanément les espoirs de reconquête fatimides, certains émirs des places maritimes encore tenues par les Egyptiens sur le littoral palestinien (nommément Césarée, Ascalon, et Acre) dépêchèrent une ambassade au duc Godefroi de Bouillon, l’implorant d’accorder aux trois villes la paix et la liberté de commercer, en échange d’un étroit vasselage (les trois gouverneurs s’engageant à payer un tribut mensuel de 5000 besants, sans parler d’importants dons en nature).
La paix fut conclue sur ces bases, l’« Avoué » du Saint Sépulcre comprenant mieux que quiconque l’intérêt d’instaurer dans les premiers temps un modus vivandi commercial en Palestine, d’autant plus nécessaire que possessions franques et arabes étaient alors étroitement imbriquées. Toutefois, cet accord ne concernait que le négoce à l’intérieur des terres, les villes côtières fatimides se voyant interdire toute relation avec les autres Etats musulmans, sous peine de sanctions sévères.
Aux premiers jours de l’année 1101, Baudouin, frère cadet de Godefroi (mort un an plus tôt) et premier véritable roi de Jérusalem, reçut une délégation de ces mêmes villes lui offrant quantité de présents et lui demandant le renouvellement des trêves. C’était mal connaître Baudouin, qui, en politique avisé et sans scrupules, accepta tous ces présents et tributs pour payer la solde de ses chevaliers, sans renoncer pour autant à son projet de doter le domaine royal de toute la façade maritime…
Profitant de l’arrivée d’une importante escadre génoise dans la première quinzaine de mars, le roi proposa aux principaux chefs de l’expédition de « travailler quelques temps au service de Dieu » et à l’agrandissement du royaume de Jérusalem, ce à quoi ces derniers consentirent, moyennant une honnête rétribution. Ils convinrent tout d’abord d’assiéger Arsuf, et, après un siège rondement mené, résolurent de porter leurs attaques contre Césarée, trente cinq kilomètres plus au nord (premiers jours de mai).
La ville, malgré son déclin depuis l’époque byzantine, présentait encore d’imposantes murailles et était entourée de superbes vergers, si bien que les assiégeants durent avant toute chose abattre un grand nombre d’arbres afin de se prémunir des embuscades.
Les troupes franques – sans doute grâce au savoir faire des charpentiers génois – mirent très vite en batterie une série d’engins de siège, faisant grand mal à la garnison et à la population de la ville. Le roi fit construite pour parachever le siège une énorme tour de bois, dépassant en hauteur les murailles de la ville et permettant un harcèlement incessant des défenseurs sur les courtines.
Au bout d’une quinzaine de jours, la défense faiblissant, les Francs donnèrent l’assaut de tous côtés de la cité aux moyens d’échelles. L’assaut fut si vif que les assiégés prirent peur et dégarnirent les murailles, se repliant selon les chroniques, derrière « un autre point fortifié qui coupait la ville en deux du côté de la mer, défendu par une muraille très vaste et très solide » (la muraille hérodienne). S’ensuivit une journée de lutte, au terme de laquelle les habitants de Césarée, peu rompus aux efforts de guerre, perdirent courage et s’enfuirent dans les rues de la ville…
Le sac fut des plus cruels, les Francs n’épargnant que les « pucelles et les enfants petits ». Une partie des habitants s’était réfugiée dans l’ancien temple d’Hérode – alors transformé en mosquée – dans l’espoir d’y trouver une retraite plus assurée. Comme deux ans auparavant dans le temple de Salomon à Jérusalem, ils furent tous massacrés et les chroniques rapportent qu’il périt tant de monde ce jour là, que « les pieds de ceux qui se livraient à ce carnage étaient inondés du sang des victimes ».
Par ailleurs, une rumeur tenace – voulant que les habitants de Césarée aient avalé leur richesse et pierres précieuses – circulait parmi la piétaille cupide, si bien que nombre d’entre eux furent éventrés, au cas ou…
Conformément à l’accord signé entre Baudouin et les Génois, ces derniers recueillirent un tiers de la ville conquise, les deux autres tiers entrant dans les possessions royales. Lors du partage du butin, se trouva un vase d’une belle couleur verte en forme de patène, qu’on affirmait être le calice de la Cène (et qui fut sans doute à l’origine de la légende du Saint-Graal). Ce dernier fut ramené dans la Cathédrale San Lorenzo à Gènes.
Césarée – dès lors appelée Césaire, à ne pas confondre avec la forteresse de Sheïzar que les Francs nommaient « la Grande Césaire » – fut confiée en 1108 à Eustache Garnier, seigneur proche du roi Baudouin, qui devint par la suite également seigneur de Sidon. Jouissant d’une longue période de tranquillité loin des combats, elle ne connut pourtant pas – faute de port en eau profonde – l’essor et la prospérité d’autres villes de la côte, telles que Saint-Jean Acre, Tyr ou Joppé.
Ce fut une ville désertée qu’occupa un lieutenant de Saladin peu après le désastre d’Hattin (1197). Au printemps de l’année 1190, le sultan, alarmé par la nouvelle de l’arrivée imminente des contingents de la Troisième Croisade, préféra démanteler la ville plutôt que de la voir reprise et refortifiée.
Lors de sa reconquête du littoral palestinien, le roi Richard, harcelé par les escadrons de Saladin, bivouaqua dans une Césarée en ruine (31 août 1190) pour mener le lendemain un combat au sud de la ville près du « fleuve mort » – l’actuel Nahr al-Mûfjir – au cours duquel les Francs eurent le dessus et tuèrent l’un des principaux mameluks de Saladin, Ayâz al-Tawîl.
Après la trêve de 1192, marquant le retour précipité du roi Richard en Angleterre, Césarée fut remise à son seigneur légitime, Julienne Garnier, descendante d’Eustache. Dès lors, de simple ville côtière, Césarée devint brutalement l’une des principales villes des lambeaux du royaume de Jérusalem, rassemblés autour de sa nouvelle capitale, Saint-Jean d’Acre.
En février 1218, le roi de Jérusalem Jean de Brienne, accompagné par le roi Léopold d’Autriche et les frères Hospitaliers, fortifia le promontoire au sud-ouest de la ville abandonnée, dotant Césarée de son « château ». A la fin de l’année 1219, alors que le roi et les contingents de la Cinquième Croisade étaient partis à la conquête de l’Egypte, le sultan Malik al-Mu’azzam, neveu de Saladin, profita de ce que la Palestine se trouvait dégarnie de troupes pour éprouver la force de la nouvelle forteresse. Il faut croire que celle-ci avait été construite à la hâte puisqu’il ne s’en fallut que de quatre jours pour que les Génois, qui s’étaient proposés de la défendre, ne l’évacuent de nuit. Une nouvelle fois, Césarée – ou plutôt ce qu’il en restait – fut rasée.
Près d’une dizaine d’années plus tard, quelques contingents de Croisés germaniques devançant l’arrivée de l’Empereur Frédéric II, résolurent, désoeuvrés qu’ils étaient, de refortifier quelques villes du littoral dont Césarée. Ils passèrent en tout et pour tout un mois à relever le château abattu.
En mars 1251, Saint Louis partit d’Acre avec les débris de son armée refortifier Césarée, qu’il dota d’une toute nouvelle enceinte, forte de seize tours et entourée d’un large fossé. Le château ne fut lui non plus pas en reste. Ce chantier dura près d’une année, au cours de laquelle les ouvriers francs purent travailler sans l’ombre d’une menace musulmane, le roi ne répugnant pas de participer lui même à la tâche, « en rémission de ses péchés »…
Puis survint Baîbars le 27 février 1265, à la tête d’une puissante armée. La muraille de Saint Louis, manquant de défenseurs, fut emportée par échelade au bout d’une semaine, la garnison se retirant dans la citadelle pour y résister vaillamment. Dans un premier temps, des mines furent menées, mais, bien vite, les sapeurs mamelouks virent leurs efforts réduits à néant, l’eau de mer du fossé entourant la citadelle s’engouffrant dans leurs galeries. Baîbars fit alors sévèrement bombarder la forteresse par d’incessantes salves de feu grégeois et des balistes établies sur tours roulantes. Le 5 mars 1265, il obtint la capitulation des défenseurs et rasa une nouvelle fois la ville et sa citadelle.