Arsuf
أرسوف
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Toponymes connus
- Arsuf - Ārsūf / أرسوف Arabic Med.
- Arsur Med.
- Tel Arshaf - תל ארשׁפ Hebrew Contemp.
- Apollonia - Απολλωνία Grec ancien Antiq.
Description
Histoire
Le site d’Arsur, aujourd’hui appelé Tell Arshaf , surplombe de son mamelon le rivage méditerranéen. Occupé depuis la plus haute antiquité – les Phéniciens d’abord, les Grecs ensuite puis les Romains qui développèrent la petite cité – c’est sous la domination musulmane que la ville connut ses première structures fortifiées, lesquelles servirent lors de l’arrivée des Francs en Palestine.
Assiégée une première fois peu après la conquête de Jérusalem par ce qui restait des troupes de la première croisade, la ville ne dut sa survie que grâce aux dissensions qui régnaient alors dans le camp chrétien, notamment entre Raymond de Toulouse en mal de possession et le tout récent Avoué du Saint Sépulcre/roi de Jérusalem Godefroi de Bouillon, pour lequel il ne pouvait y avoir de seigneurie provençale sur la facade maritime du royaume de Jérusalem, dont il s’ingéniait à poser les jalons. Ce dernier dut donc mener seul le siège de la ville, réduit à ses seules forces et sans flotte.
Apprenant par la suite que Raymond et Godefroi s’étaient finalement réconciliés, les gens de la ville jugèrent prudent de se reconnaître spontanément vassaux de ce dernier et lui envoyèrent, comme il était d’usage alors, des otages. En retour, l’Avoué leur envoya en garant de sa bienveillance Gérard d’Avesnes, en qualité de résident/otage.
Le retour des derniers chefs de la croisade en Europe et la remontée des troupes provençales vers Laodicée laissèrent les mains libres à Godefroi de Bouillon qui reprit ses projets contre la ville maritime d’Arsur. A l’approche des troupes franques, la garnison s’empara du malheureux Gérard d’Avesnes qui fut exposé, ligoté sur un mat au dessus des remparts, aux traits des siens.
Malgré ses supplications, le siège n’en continua pas moins, du 15 octobre jusqu’au 15 décembre, se soldant par la destruction – via le feu grégeois – des deux tours de siège mises en branle par les assaillants. Découragé, Godefroi rentra à Jérusalem en laissant néanmoins à Ramla cent chevaliers et deux cent fantassins avec pour mission d’exercer des ravages quotidiens sur la campagne d’Arsur. Ce blocus à distance devait finir par saper la résistance des Arsufî : en février 1100, croyant le blocus levé, la population s’était répandue dans la campagne environnante pour mener des travaux des champs ; aussitôt alertés, quarante chevaliers accoururent de Ramla et firent grand massacre, poussant même la cruauté à renvoyer les survivants nez, pieds ou mains coupés dans leur ville… Un rezzou similaire eut lieu un mois après, malgré l’envoi d’un renfort de troupes fatîmides entre temps.
La protection égyptienne s’avérant inefficace, les gens d’Arsur, pour pouvoir cultiver leurs terres, décidèrent une nouvelle fois de solliciter la protection franque. Le 25 mars 1100, une délégation de la ville vint apporter à Godefroi les clés de la ville et de ses tours, et offrir un tribut annuel. Peu après, l’Avoué eut la surprise de voir arriver à Jérusalem Gérard d’Avesnes, que les Arsufî lui renvoyaient en témoignage de bienveillance.
Un modus vivendi s’installait en Palestine, les intérêts commerciaux rapprochant Francs et Arabes.
Profitant de l’arrivée d’une escadre de guerre génoise, le roi Baudouin de Jérusalem vint mettre le siège devant Arsur en avril 1101, cette fois-ci par terre et par mer. Les habitants, à la veille de l’assaut, offrirent de capituler à condition de se retirer avec leur famille et leur biens, ce qui leur fut accordé.
Dès sa conquête, la ville fut placée dans le domaine royale, bien qu’en réalité administrée par le seigneur de Caïffa, Robert des Pouilles. Quelques décennies plus tard, elle devint le siège d’une véritable seigneurie avant de retomber pour quatre ans sous la domination musulmane suite à la bataille de Hattîn, en 1187.
Lors de la reconquête méthodique par Richard Cœur de Lion du littoral palestinien l’armée franque eut à combattre devant Arsur. En cette torride journée du 7 septembre 1191, les forces ayyoubides, délaissant leur tactique de harcellement, passèrent à l’action et criblèrent l’ost de flèches, faisant grand mal au chevaux. Alors sonna la charge, dirigée sur trois fronts, qui balaya tout sur son passage et sema la panique parmi les musulmans, qui se réfugièrent dans les collines boisées sur les hauteurs de Arsur.
Suite à cette fameuse bataille, la ville réintégra donc les possessions franques et échut en 1207 à Jean d’Ibelin « le vieux sire de Barut », lequel avait épousé Melisende d’Arsur, héritière du domaine. Ce fut leur fils, Jean II d’Ibelin-Arsur qui entreprit la construction de la forteresse d’Arsur en 1241. Son fils Balian, conscient du péril que représentait la montée en puissance des Mamelouks dans la région, et désespérant de ne pouvoir défendre seul son fief, préféra vendre progressivement ses droits sur la ville, la forteresse et la seigneurie entière à l’ordre de l’ Hospital, qui renforça encore les fortifications.
Bien lui en prit, puisqu’en avril 1265, le terrible sultan Baybars arriva sur place à la tête d’une grande armée. Les Hospitaliers avaient sérieusement approvisionné la place en homme, matériel et nourriture, si bien qu’ils offrirent une belle et forte résistance. Il fallut quarante jours d’attaques incessantes, la mise en oeuvre de mines et de formidables machines de siège ainsi que l’implication du sultan lui même (qui combattit à cette occasion comme un simple soldat, et fut même blessé lors d’une sortie subite de la garnison) pour que la ville basse soit conquise. La citadelle résista encore trois jours, les derniers hospitaliers – ils n’étaient plus que cent vingt – ayant obtenu de se retirer la vie sauve. Toutefois, le sultan revint sur la parole donnée et les fit enchaîner, non sans les avoir obligés à raser les murailles et incendier la forteresse.
Cette destruction fut si complète que le site n’a pas été repeuplé depuis lors et, durant les siècles qui suivirent, il demeura couvert de terre et de sable apportés par les vents.